jeudi 31 octobre 2019

n°315
Les Raboteurs de parquet (1875)
Gustave Caillebotte



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Œuvre :  Les Raboteurs de parquet
Artiste : Gustave Caillebotte 
Année : 1875
Technique : Huile sur toile
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Impressionnisme
Lieu : Musée d'Orsay (Paris)


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« Hideux, Vulgaire ! », c’est par ces mots que cette œuvre fut qualifiée par le jury lorsqu’elle fut présentée au Salon officiel de 1875. L’œuvre fut en effet refusée car le sujet était jugé trop « cru » et trop réaliste.
En fait, le sujet de cette œuvre est assez innovant. Jusqu’alors, on représentait de riches bourgeois en ville ou des pauvres paysans à la campagne. Représenter le prolétariat urbain, c’est à dire des ouvriers en ville était bien plus rare.

Avec Les Raboteurs de parquet, Caillebotte n’adresse aucun message. Il dresse un simple témoignage du quotidien de ces ouvriers et de leur savoir-faire. D’ailleurs, Caillebotte était un bourgeois.
La pièce de style haussmannien représentée ici fait partie de son propre hôtel particulier situé à Yerres au sud de Paris (d’autres situent la pièce dans un appartement parisien de la plaine Monceau). Le peintre joue avec la perspective grâce aux lignes du parquet qui donnent une grande profondeur à la pièce.

Caillebotte a peint l'année suivante une deuxième
version de son tableau, jugée plus "convenable".
Elle est actuellement exposée au Danemark
Trois personnages sont représentés. Ils s’affairent à  raboter un parquet. Le tableau permet de mettre en lumière un métier aujourd’hui disparu. Les raboteurs ou les frotteurs de parquets étaient des ouvriers chargés de racler les parquets en bois, au moyen de rabots spéciaux ou des grattoirs en acier, parfois même au moyen d’un bout de verre. Ils effectuaient un véritable décapage à la main qui permettait de lisser le parquet qui était ensuite poncé à la paille d’acier. Enfin, il pouvait être ciré ou vernis.

Le peintre a profité de la présence de ces ouvriers à son domicile pour étudier attentivement leurs gestes, leurs outils et  leurs techniques. Les trois ouvriers sont représentés à genoux dans une position qui semble inconfortable. Ils ont le dos nu, leur peau luit de sueur et on distingue à peine leurs visages.
A gauche, l’un des raboteurs concentré sur sa tâche est isolé des deux autres tandis que les deux autres semblent plus complices et solidaires : leurs gestes semblent s’accorder, sans qu’il soit besoin de mots. Une bouteille de vin sert à « réconforter » le travail pénible de ces hommes.

Les outils ont une place importante et nous en apprennent sur les gestes de chaque ouvrier. L’homme de droite muni de son rabot et d’un marteau, s’affaire à raboter les joints des lames de parquet. Les deux autres sont munis d’un racloir en fer et d’un affiloir (pour l’affuter).

Le refus de l’œuvre au Salon qui incita Gustave Caillebotte,  à rejoindre le mouvement impressionniste. Le tableau fit lors présenté à la deuxième Exposition des peintres refusés de 1876, où le tableau remporta un grand succès.



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mercredi 30 octobre 2019

n°314
Pierre à cerfs (env 1000 av JC)



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Œuvre : Pierre à cerfs
Artiste : inconnu
Année : env 1000 av JC
Technique :  Sculpture sur pierre
Epoque : Antiquité
Mouvement : Art des steppes
Lieu : Tsatsyn Ereg (Mongolie)

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Aux confins de la province de Khövsgöl, en plein cœur des steppes mongoles se cachent d’étranges pierres  sculptées qui datent de l’âge de bronze. Ce sont des mégalithes, c’est-à-dire des monuments de la famille des menhirs et des dolmens.

Les pierres auraient été érigées et sculptées par des peuples nomades de l’âge de bronze. Près de 900 stèles ont été retrouvées dans les plaines de Mongolie ! Elles ont été gravées et polies par des outils en pierre et des outils métalliques, avant d’être dressées. Elles mesurent au moins un mètre de hauteur et certaines mesurent plus de quatre mètres. Le sommet des pierres a été volontairement taillé. Il peut être plat, arrondi comme celle-ci biseauté.

Les figures représentées sur ces stèles sont la plupart du temps des animaux ainsi que des formes géométriques. Sur ce mégalithe par exemple, on aperçoit des cerfs (certains y voient plutôt des rennes)  et des disques. Sur d'autres stèles sont représentées des armes, ce qui suppose qu'elles avaient un rôle de protection pour es guerriers nomades.

Le cerf est un animal emblématique des nomades mongols. C’était un animal vénéré. Contrairement au cheval, le cerf ne se laisse pas domestiquer ce qui lui permet de garder un contact avec les esprits de la nature. De plus, grâce à ses bois qui peuvent tomber et repousser, il est perçu comme un être à la fois animal et végétal.
Sur l’ensemble des pierres où apparaissent des cerfs, les animaux sont représentés en train de bondir, voire de voler. Ici, les cerfs sont gravés les uns derrière les autres, à la manière d’une horde qui se dirige vers le sommet du monument.
Au sommet de la stèle, un disque représentant le soleil indique que les animaux cherchent à rejoindre le monde des esprits. Leur museau a l’apparence d’un bec d’oiseau. Ils ont un corps très allongé, l’œil rond, et leur bois sont stylisés comme des volutes.

On ne sait pas grand-chose sur l’usage de ces mégalithes. S’agit-il de pierres tombales ? Servaient-ils à certains rites religieux ? Mystère, il est difficile de connaître la signification de ces pierres car elles ne comportent aucune inscription et aucun monument n’est érigé autour.



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mardi 29 octobre 2019

n°313
L'Atlantique (1931)
Adolphe Mouron Cassandre



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Œuvre : L'Atlantique
Artiste : Adolphe Mouron (A.M.)  Cassandre 
Année : 1931
Technique : Affiche publicitaire, lithographie en couleurs
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Futurisme
Lieu : Collection particulière


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Malgré le naufrage du Titanic survenu vingt ans plus tôt, les croisières et les traversées transatlantiques sont très à la mode pendant l’entre-deux guerres. Les français rêvent d’exotisme. Ainsi, on fabrique des paquebots de plus en plus impressionnants, de plus en plus luxueux et qui naviguent de plus en plus loin.

C’est en 1930, que le paquebot l’Atlantique fut mis en service. Ce paquebot long de 227 mètres et pesant plus de 42 000 tonnes a été construit à Saint Nazaire par la Compagnie de navigation Sud-Atlantique. Il proposait aux passagers une traversée de l’Océan Atlantique, jusqu’au Brésil (Buenos Aires ou Rio de Janeiro) avec des escales aux Antilles, le tout en seulement trente jours.
L'Atlantique était le plus prestigieux des paquebots sur la ligne d'Amérique du sud. Véritable palais flottant, il possédait une galerie marchande dans sa rue centrale longue de 137 mètres, qui comptait 40 boutiques de luxe.

Après quelques traversées qui eurent un énorme succès commercial, la Compagnie fit appel au graphiste Adolphe Mouron, plus connu sous le pseudonyme Cassandre, pour réaliser des affiches publicitaires et promouvoir  ses traversées transatlantiques.

Cassandre  est un artiste d’origine ukrainienne. Lorsqu’il arrive à Paris, il fonde l’Alliance graphique, une agence de graphistes où il collabore avec d’autres artistes dont Charles Loupot. Le travail de Cassandre est très inspiré de plusieurs mouvements artistiques :
- le cubisme, rendu célèbre par Picasso, qui valorise la géométrie
- le purisme qui valorise les formes simples et la machinerie
- le futurisme qui s’intéresse à la vitesse et aux nouvelles technologies.

Pour cette affiche publicitaire, Cassandre met l’accent sur les dimensions hors-normes du bateau. Toute l’affiche est conçue pour qu’il paraisse gigantesque, un argument publicitaire qui symbolise le luxe et la solidité du bateau. Après tout, Cassandre disait lui-même : « Une affiche est faite pour être vue »

D’abord, L’Atlantique est présenté face à la coque, en contre-plongée ce qui le rend impressionnant. On devine à peine les cheminées du bateau.
Pour rendre le paquebot encore plus grand, un petit remorqueur aux cheminées fumantes est peint astucieusement devant l’énorme coque sombre du paquebot pour en exagérer la taille. Cassandre utilise ce stratagème dans de nombreuses publicités. Dans une affiche similaire pour le paquebot le Normandie, il dessine cette fois des oiseaux exagérément petits devant la coque du navire.
Enfin, le paquebot à la coque bleu-marine contraste avec le fond blanc cassé qui l’entoure. L’ensemble est très géométrique, la coque forme même un rectangle dont les lignes verticales permettent d’allonger encore plus le bateau.

Le résultat est  une affiche d’une apparente simplicité. Elle contient peu d’informations pour que celui qui la voit comprenne immédiatement ce qu’elle raconte. Le bateau remplit presque tout l’espace. Il est représenté sans détails (pas de hublots par exemple), et les écrits sont peu nombreux : le lieu (Amérique du Sud), le nom du bateau, son poids et le nom de la compagnie.

L’affiche publicitaire contribuera au succès de la traversée. Malheureusement, après seulement dix traversées, l’Atlantique fut ravagé par un incendie criminel sur la route de Buenos Aires en 1933.

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lundi 28 octobre 2019

n°312
Nebamon chassant dans les marais (1350 av JC)



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Œuvre : Nebamon chassant dans les marais
Artiste : inconnu
Année : 1350 av JC
Technique : Fragment de fresque murale
Epoque : Antiquité
Mouvement : Art égyptien
Lieu : British Museum (Londres)



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Il est bien connu que les civilisations d’Egypte Ancienne étaient déjà très avancées, notamment dans le domaine de l’art. Cette œuvre d’art peinte il y a près de 3500 ans le démontre assez bien.

Il s’agit d’un petit fragment qui faisait partie d’une grande fresque qui décorait les parois du tombeau de Nebamon. C’est l’archéologue Giovanni d’Athanasi qui le découvrit en 1820 lors de fouilles archéologiques financées par le Consul britannique.

Le Jardin
Nebamon a vécu vers 1350 av JC.  Il était scribe et comptable de céréales. Il était de rang intermédiaire, c’est-à-dire ni pauvre, ni très riche mais la richesse des décorations de son tombeau atteste que c’était quand même une personne importante car il était en partie responsable des livraisons de céréales en Egypte. On ne sait presque rien sur cet homme excepté que son nom signifie "Mon Seigneur est Amon", le dieu Amon étant vénéré dans les temples de Thèbes (aujourd’hui la ville de Louxor).

Le XIXème siècle étant marqué par une passion dévorante pour les antiquités égyptiennes, L’archéologue n’hésite pas à ramener les onze plus beaux morceaux de la fresque à Londres, dont celui-ci.

Le banquet (musiciens et danseurs)
Ces fragments sont de véritables trésors et nous en apprennent beaucoup sur l’art de vivre des égyptiens et sur leurs croyances.
Celui-ci met en scène le défunt  Nebamon lui-même en train de chasser, coiffé d’une perruque nattée. Avec sa main gauche, il brandit un bâton en forme de serpent, tandis que sa main droite tient fermement trois appeaux, des oiseaux dressés à crier pour attirer ses congénères dans des pièges.
Le chasseur se tient debout sur une embarcation en tiges de papyrus renforcée par des planches de bios.
Son épouse Hatshepsout se tient derrière lui, habillée de ses habits de cérémonie. Elle tient une brassée de lotus dans sa main droite, un sistre dans sa main gauche (une sorte de tambourin) et porte un cône de cire parfumée sur sa tête. L’une de ses filles apparaît accroupie entre les deux jambes du scribe.

L'agriculture et l'élevage
Les égyptiens croyaient à une vie après la mort. C’est pour cela qu’ils conservaient les corps des défunts en les momifiant. Ils nourrissaient tous les jours les statues des morts et décoraient les tombeaux de fresques. Dans ce tombeau, des hiéroglyphes nous renseignent sur le rôle de ces fresques : ils indiquent « se faire plaisir, contempler la beauté là où l’existence se répète éternellement ». Ainsi, la fresque aide l’âme du défunt à rejoindre le monde des morts pour l’éternité. Pour que cela « fonctionne », peu importe si le personnage ressemblait au défunt, le plus important était de respecter un certain nombre de règles: la tête et le torse devaient être nus et peints de profil, de larges épaules pour mettre en valeur sa parure etc…

Nebamon assis
Devant le scribe sont peints avec beaucoup de minutie, de nombreux oiseaux de différentes espèces, notamment des ouettes. Certains volent tandis que d’autres continuent de couvert leurs œufs. Le fleuve est quant à lui habité par de nombreux poissons dont un, à gauche, qui semble touché par une lance. Il y avait sans doute un deuxième personnage en train de pêcher. Animal adoré des égyptiens et compagnon fidèle des chasseurs, un chat est lui aussi en train de chasser. Il tient deux oiseaux dans ses griffes et un dans sa gueule.

Ce fragment, comme les dix autres, montrent des jardins luxuriants et une nature riche, fertile et abondante, un paradis où est censé reposer le défunt. Que l’on y croit ou non, Nebamon repose toujours dans son tombeau 3500 après sa mort. Une chance pour lui : on ne sait même plus où se trouve l’emplacement exact de son tombeau!



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dimanche 27 octobre 2019

n°311
Le cube orange (2005)
Dominique Jakob et Brendan MacFarlane



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Œuvre : Le cube orange
Artiste : Dominique Jakob  et Brendan MacFarlane 
Année : 2005
Technique : Bâtiment de cinq étages
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Art contemporain
Lieu : Quai Rambaud, Lyon (France)

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En 1995, la ville de Lyon souhaite faire de la presqu’île de la Confluence, un lieu urbain, animé et dynamique. Le maire de l’époque, Raymond Barre souhaite transformer cet ancien site portuaire, pour en faire une vraie zone d’activités commerciales et culturelles, constituée de bâtiments modernes et écologiques. C’est dans ce contexte que le cube orange est né.

Le Cube orange a été imaginé et conçu par l’agence d’architecture parisienne Jakob + MacFarlane fondée par Dominique Jakob et Brandan MacFarlane.
Leurs objectifs étaient de créer un bâtiment contemporain, baigné de lumière mais qui garde l’esprit industriel de la presqu’île. Pour imaginer leurs bâtiments souvent complexes, ils utilisent des logiciels d’architecture 3D.

Le concept du duo d’architecte est pharaonique : un bâtiment de cinq étages en forme de cube, d’une surface de 6300 m² accolé à côté des anciennes halles des Salins du Midi, un long bâtiment caractérisé par trois arcs de sa structure.
La couleur orange minium est choisie pour rappeler  la peinture au plomb rouge, une couleur industrielle souvent utilisé dans les zones portuaires.

Construire un simple cube n’est pas un projet à la hauteur du talent des deux architectes. Aussi, ce qui fait la particularité de ce cube est un immense trou horizontal en forme de cône, creusé dans le volume: un moyen ingénieux de faire rentrer l’air et surtout la lumière jusqu’au cœur de cet épais bâtiment (il mesure près de 30 mètres de côté).
Ainsi, quel que soit le niveau où l’on se trouve, chacun peut bénéficier de la lumière et de la magnifique vue donnant sur la rivière. De plus, chaque étage donne accès à des balcons et des terrasses.

Ce trou est ce qu’on appelle en architecture une « perturbation », c’est-à-dire une irrégularité de l’espace. Il y en a en fait trois : le fameux cône est la perturbation la plus visible. Une deuxième perturbation est située à l’angle de la façade constitue l’entrée principale du bâtiment. La dernière perturbation est située au niveau du toit pour encore plus de lumière.

La façade du bâtiment est habillée d’un treillis orange en aluminium qui ressemble à un filet de pêche, un nouvel  hommage au passé portuaire de la presqu’île. Ce treillis est comme la « peau » du bâtiment. Il est  composé de petits trous de différentes tailles qui rappellent les trous perturbations du bâtiment.

Comme tous les projets innovants et contemporains, le cube réalisé avec budget de 11 millions d’euros à beaucoup fait réagir. Depuis son inauguration en 2011, il est autant adoré que détesté. En tout cas on ne peut pas l’ignorer !

En plus d’être esthétique, le bâtiment ainsi que tous les nouveaux édifices du quartier de la Confluence ont été conçus pour être les plus écologiques possibles. Aujourd’hui, le quartier Confluence est certifié HQE (haute qualité environnementale) et labellisé WWF (World Wide Fund) pour la protection de l’environnement. Il a également reçu le prix « formes urbaines et densité » du palmarès des écoquartiers en 2009.



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vendredi 25 octobre 2019

n°310
Autoportrait à la fourrure (1500)
Albrecht Dürer



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Œuvre : Autoportrait à la fourrure
Artiste : Albrecht Dürer 
Année : 1500
Technique : Huile sur panneau de bois de tilleul
Epoque : les Temps Modernes
Mouvement : Renaissance allemande
Lieu : Alte Pinakothek, Munich (Allemagne)



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Voici le dernier des trois autoportraits du peintre allemand Albrecht Dürer. Le plus connu,  le plus spectaculaire mais aussi le plus complexe.

Vêtu d’un long manteau de fourrure, Dürer est ici âgé de 28 ans. Le peintre a de long cheveux bruns ondulés, une barbichette et une moustache. Le fond noir, les tons sombres contrastent avec la grande lumière qui illumine son visage.
Il fait face au spectateur  et laisse voir son corps en buste, une position peu courante à  une époque où les portraits sont de profil ou de trois-quarts. La position frontale était surtout  réservée aux rois figures religieuses. Cette frontalité et son regard très perçant lui donnent beaucoup de prestance et une attitude très charismatique.  Cela contraste avec  son visage assez rigide, neutre, et sans expression particulière qui souligne la maturité du jeune homme.

Des tons sombres, des cheveux longs ondulés, une barbe, un regard pénétrant… Tout cela paraît très symbolique, voire … religieux. En regardant bien, il nous fait même penser à quelqu’un…
C’est bel et bien ce qui fait de cet autoportrait l’une des œuvres les plus connues de la Renaissance allemande, c’est l’énorme ressemblance du peintre avec … Jésus-Christ !

Personne ne sait vraiment à quoi ressemblait Jésus Christ de son vivant, Mais depuis le Moyen Âge (et encore aujourd’hui), on représente le visage du Christ ainsi : une courte barbe, une moustache et des longs cheveux bruns.
Tout est fait pour que ce tableau ressemble à une œuvre religieuse : la position frontale du peintre, la symétrie du tableau (son corps forme une pyramide), et sa main tenant son manteau qui rappelle une bénédiction du Christ.

De chaque côté de son visage, deux inscriptions dorées sont mises en valeur par le fond noir. A gauche apparaissent les initiales A.D. du peintre sous la forme d’un monogramme, ainsi que l’année 1500. A droite peut se lire une phrase qui peut être traduite comme suit : "Moi, Albrecht Dürer de Nuremberg, j’ai ainsi créé, à l’âge de 28 ans, mon portrait dans les couleurs qui me caractérisent."

Difficile de dire si, à l’origine, cette ressemblance avec le Christ était volontaire ou non. Sûrement… A la même période, Dürer réalise deux œuvres religieuses où le Christ a une pose et une expression similaire à cet autoportrait.
Certains pensent qu’en tant qu’artiste, il se compare à Jésus en tant que créateur. Une autre interprétation veut que le tableau soit une manière de reconnaître que ses talents artistiques lui ont été donnés par Dieu. Enfin, d’autres pensent que le peintre était tout simplement très orgueilleux et un  peu narcissique !
Finalement, c’est peut-être un peu de tout ça à la fois… !




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jeudi 24 octobre 2019

n°309
La mort de l'Agent Scanlon (1946)
Sidney Nolan



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Œuvre : Death of Constable Scanlon (La mort de l'Agent Scanlon)
Artiste : Sidney Nolan 
Année : 1946
Technique : Peinture émail laquée sur panneau de bois
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Modernisme / Angry Penguins
Lieu : National Gallery of Australia, Canberra (Australie)



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Certains hors-la-loi sont devenus au fil du temps des légendes. Aux Etats Unis, on connaît Jesse James, Calamity Jane ou Bonnie and Clyde dont les récits ont été de nombreuses fois adaptés au cinéma. En Australie, c’est l’histoire du tueur Ned Kelly qui est devenu une véritable légende nationale.
Comme beaucoup d’australiens, le peintre Sidney Nolan est fasciné par le parcours de ce criminel. Tellement passionné qu’il décida de retracer toute la vie de cette figure légendaire du XIXème siècle, à travers une série de presque 30 tableaux que l’on appelle aujourd’hui la série Ned Kelly.

Son travail aux motifs exotiques et aux couleurs très vives est aussi inspiré des œuvres du  Douanier Rousseau, pour qui Nolan vouait une vraie passion.

Ned Kelly (1854-1880)
Pour comprendre ce tableau en particulier, il est important de connaître cette fameuse légende.
Ned Kelly est né dans les terres reculées d’Australie. Il est issu d’une famille de fermiers pauvres. Son père vole du bétail pour survivre et meurt lorsque Ned a onze ans. Il va commettre des petits délits mais sa famille ayant une très mauvaise réputation, il va être accusé de tous les crimes de la région. Ned est très tôt considéré comme un bushranger, un hors-la-loi en cavale. Il fera de nombreux séjours en prison, souvent à tort selon lui.
Constable Scanlon
 (ou Scanlan)
 

Mais sa vie bascule lorsqu’un jour de 1878, en cavale avec ses complices, il tombe par hasard sur quatre agents de police (des "constables") à Stringybark Creek. Considérant leur faible chance de survie, le groupe décide de désarmer les policiers et de leur prendre leurs chevaux. Mais l'attaque tourne mal, trois des quatre policiers sont abattus, le dernier fuyant sur un cheval blessé.
La véritable armure de Ned Kelly
En fuite, Ned Kelly et ses complices braquent des banques. Pour éviter les balles de revolver, ils se construisent une armure en métal. Son armure et son heaume marchent à merveille mais seul le haut de leurs corps sont protégés. Lors d’un échange de coups de feu avec la police, Ned Kelly est touché aux jambes, il tombe et est assommé d'un coup de fusil. Les complices de Kelly sont tués. Finalement, Ned Kelly fut arrêté et condamné à mort.

Aujourd’hui, Ned Kelly est devenu une légende qui représente la résistance contre les autorités. Alors qu’il fut pourtant un tueur de policiers, il est toujours surnommé le Robin des Bois australien car il donnait une partie de son butin à ses amis et à sa famille, parfois même à ses otages.

Ned Kelly (Ned Kelly part en cavale)
Sidney Nolan - 1946
C’est ce véritable western australien que le peintre Sidney Nolan a voulu montrer à travers ses peintures. Très imaginatif, il est fasciné par les lieux chargés d’histoire. Il ne s’agit pas de rendre hommage au criminel mais plutôt de revivre cette histoire spectaculaire dans cet univers désertique australien. Il disait « Le désir de peindre un paysage donne envie d’en savoir plus sur les histoires qui s’y sont déroulées ».

Pour peindre ce tableau, comme les autres tableaux de la série, le peintre utilise les propres mots de Ned Kelly, des témoignages récoltés lorsque le criminel fut jugé par un tribunal.
Lorsque de l'exposition de ses tableaux, on pouvait même lire les citations de Ned Kelly qui correspondaient aux tableaux.

Le camp (Ned Kelly épie le camp de policier)
Sidney Nolan - 1947
Ce tableau par exemple, La mort de l’Agent Scanlon (que certains écrivent Scanlan), évoque le moment où Ned Kelly tue l’Agent Michael Scanlon, l’un des trois policiers tués à Stringybark Creek. Nolan a peint le moment précis où le policier tombe de son cheval. Le peintre explique : « Le policier voulut tuer Ned Kelly mais celui-ci a tiré le premier. Scanlon est tombé de son cheval et mourut  presque immédiatement.  Soudainement, le temps d'un accident violent semble s'être arrêté. C’est un peu exagéré : la bride du cheval est trop longue mais ce cheval et ce policier en lévitation montrent que tout cela est un peu irréel. »
Le tueur Ned Kelly, est représenté avec son armure et son heaume, à la manière d'un Zorro. En regardant le spectateur, il semble presque s’ennuyer de la situation, attendre que tout cela finisse. Il semble tuer avec une grande facilité ! Une attitude absurde, presque comique, qui atténue la violence de l’évènement. D’ailleurs, le policier n’a aucune trace de sang sur son veston.
Le procès (Ned Kelly est jugé pour meurtre)
Sidney Nolan - 1947
L’ensemble est donc très enfantin, un naïf très à la mode dans la peinture à cette époque.
aspect

Mais le choix d’illustrer la vie de Ned Kelly n’était pas un hasard. La vie du criminel faisait écho avec la propre vie du peintre car ce dernier a été aussi considéré comme hors-la-loi par la justice australienne pour avoir déserté son service militaire. Le peintre raconte donc aussi, à sa manière, sa propre histoire à travers ses œuvres.




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mercredi 23 octobre 2019

n°308
Portrait de femme (La Belle Ferronnière) (env 1495)
Léonard de Vinci



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Œuvre : Portrait de femme,  dit à tort "La Belle Ferronnière"
Artiste : Léonard de Vinci 
Année : env 1495
Technique : Huile sur panneau de bois de noyer
Epoque : les Temps Modernes
Mouvement : la Renaissance
Lieu : Musée du Louvre (Paris)



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Léonard de Vinci est sans doute le plus grand génie de notre histoire, en tout cas le peintre le plus connu. Tout le monde connaît au moins un tableau de lui, souvent la Joconde. On connaît beaucoup moins ce Portrait de femme, appelé à tort « La Belle Ferronnière ». Nous allons voir que, bien qu’ayant de nombreuses similitudes avec le mythique Portrait de Mona Lisa, ce Portrait de femme est l’anti-Joconde !

Travaux d'analyse (ici par fluorescence X)
et de restauration de l'oeuvre en 2013.
Comme la Joconde, ce portrait comporte lui aussi une grande part de mystère. On ne sait rien des conditions de sa réalisation.  Il s’agit de l’un des tableaux de Léonard de Vinci pour lesquels nous possédons le moins d’informations. Ces dernières années, le tableau fut restauré et analysé avec les derniers outils scientifiques : infrarouge, rayons X, radiographie… On a pu en savoir un peu plus mais il reste de nombreux points d’interrogation.

- Qui a peint ce tableau ? L’œuvre n’est même pas signé et il n’existe aucune preuve qu’il s’agisse bel et bien d’un tableau de Léonard de Vinci. Toutefois, les spécialistes sont aujourd’hui d’accord car des analyses ont montré que le support en bois sur lequel est peint le portrait, est issu du même arbre qu’un autre tableau de Vinci « La Dame à l’hermine ». Au moins, le tableau est issu de l’atelier du peintre mais on ne saura jamais s’il a été peint de ses propres mains.
La "véritable" Belle Ferronnière,
 maîtresse de François Ier
et épouse d'un certain Le Ferron

- Comment s’appelle ce tableau ? On a longtemps appelé la toile « La Belle Ferronnière » mais c'est une erreur : ce nom désigne un autre tableau de Léonard de Vinci qui représente l’une des maîtresses de François Ier ! C’est le peintre Ingres qui a l’origine de cette confusion entre les deux œuvres du peintre. Bien qu’on ait depuis corrigé l’erreur (on l’appelle sobrement « Portrait de femme »), le titre erroné est resté dans la mémoire et beaucoup nomment encore à tort ce tableau « La Belle Ferronnière »

- Où a –t-il été peint ? Quelle année ? Impossible de le savoir avec certitude. Les historiens s’accordent pour dire qu’il aurait été peint lorsque De Vinci vivait à Milan, entre 1483 et 1499, probablement à la fin de cette période, soit vers 1495. On ignore quand et comment le tableau s’est retrouvé cent ans plus tard dans les collections du roi de France. Le peintre l’a-t-il offert à François Ier ? A-t-il été apporté de Milan à Amboise sur ordre de Louis XII ? Mystère!

Qui est la jeune femme ? Comme on l’a dit, on a longtemps cru, par confusion, qu’il s’agissait de la maîtresse du roi François Ier.  Aujourd’hui, comme la Joconde, on ne connaît pas exactement l'identité du modèle. Deux hypothèses existent. Certains pensent reconnaître un portrait de Lucrezia Crivelli, la maîtresse de Ludovico Sforza (qui était duc de Milan et mécène de l’artiste).  D’autres y voient le portrait de la femme de celui-ci, Béatrice d’Este.

La jeune femme est représentée vu de trois-quarts. Elle porte un costume à l’espagnol, très à la mode dans la cour de Milan. Ses cheveux sont plaqués et mettent en valeur la forme de son visage. Elle est coiffée d'un bonnet très discret. Son front est habillé d’un petit bijou qu’on appelle… une ferronnière (d’où la confusion !). Elle est debout derrière une sorte de parapet qui cache ses mains.

La Joconde est célèbre pour son sourire et son regard bienveillant, plein de douceur. A l'opposé, l'attitude de cette jeune femme est bien plus sombre et provocante. Menton baissé, pas de sourire et regard appuyé, elle semble sûre d’elle, à la limite de l’insolence.  Alors que la Joconde nous semble nous observer quel que soit l’angle où on l’admire, le regard de cette femme est encore plus complexe. Impossible de savoir si elle nous regarde ou si au contraire ses yeux nous évitent.

Un regard mystérieux à l’image de l’histoire de ce tableau. Ce qui est sûr, comme la plupart des œuvres de Léonard de Vinci, c’est que ce portrait n’a pas fini de dévoiler ses mystères.



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