mercredi 13 novembre 2019

n°319
Les commérages (1948)
Norman Rockwell



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Œuvre : Les commérages (The gossips)
Artiste : Norman Rockwell 
Année : 1948
Technique : Huile sur toile
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Photoréalisme
Lieu : Collection privée prêtée au Norman Rockwell Museum, Stockbridge (Etats Unis)


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Les ragots, les rumeurs, les commérages .... Des attitudes aussi ridicules que malveillantes ! C’est en tout cas le message que nous laisse Norman Rockwell.

La toile se lit sans le sens de la lecture, comme un texte qui nous raconte l’histoire d’une vive rumeur. A la manière du jeu du téléphone arabe, la première dame lance un ragot à une autre, cette dernière répète ce qu’elle a entendu à une autre et ainsi de suite. Les personnages sont donc tous représentés deux fois car ils répètent les commérages qu’ils viennent d’entendre. Si chaque dessin était sur une seule page, on pourrait en tournant les pages très rapidement, en faire une animation.

Rockwell accentue les expressions des personnages : chacun d’eux montre une attitude différente : la colère, la joie, la moquerie, l’étonnement, ou la discrétion. Ces différentes attitudes montrent que la même histoire ne provoque pas les mêmes réactions en fonction des personnes, sûrement car la rumeur est déformée un petit peu plus à chaque fois qu’elle est racontée à la personne suivante. Pour preuve, la dernière personne est la même que la première, un vrai cercle vicieux cette rumeur ! Le commérage fut tellement déformé au fil des interlocuteurs que cette vieille femme ne fait même pas le lien avec la rumeur qu’elle avait  elle-même déclenchée.
D’après l’attitude de l’homme au chapeau qui lui raconte le ragot, on a même l’impression que la rumeur finit par se retourner contre la vieille dame.

Pour peindre ces personnages aussi vrais que nature, l’artiste photographiait des voisins ou des commerçants d'Arlington, dans le Vermont, où Rockwell habitait. Des connaissances qui acceptaient de jouer les modèles et de prendre la pose. Au milieu, la femme à la queue de cheval est Mary Rockwell, l'épouse du peintre tandis que l'avant-dernier personnage est Rockwell lui-même! Le montage des photographies montre à quel point la peinture est fidèle aux modèles.

L’artiste américain a travaillé longtemps sur cette peinture. Il nous raconte à sa manière une expérience qui lui est arrivée.  Norman Rockwell était déjà un illustrateur reconnu. Il dessinait ou peignait pour des couvertures de journaux. Il imagina cette toile dès 1936, lorsqu’il entendit qu’une rumeur courait sur lui.
Il en avait dessiné une ébauche qui était parue dans le "Ladie's Home Journal" de Novembre 1936.
Douze ans plus tard, il reprit son idée et réalisa ce tableau pour la couverture du journal «Saturday Evening Post» du 6 mars 1948. Le dessin très humoristique remporta un succès immédiat auprès des lecteurs.
Curieux, des milliers de lettres ont été envoyées à la rédaction du « Saturday Evening Post» pour demander quelle était cette fameuse rumeur que les personnages se transmettaient, mais aucune réponse ne leur a été donnée.
Le succès du tableau a même retentit chez les modèles des personnages. Un modèle a déclaré à un journaliste: «C'est plus amusant de poser pour lui que d'aller au cinéma. » La vieille dame, celle qui "commence les commérages", a moins bien vécu la situation. Mécontente du rôle que lui avait fait jouer Norman Rockwell, elle est restée très longtemps sans lui adresser la parole !


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mardi 5 novembre 2019

n°318
Entrée des animaux dans l’Arche de Noé (env 1570)
Jacopo Bassano



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Œuvre : Entrée des animaux dans l’Arche de Noé
Artiste :Jacopo Bassano 
Année : vers 1570
Technique : Huile sur toile.
Epoque : Temps modernes
Mouvement : Maniérisme
Lieu : Musée du Prado (Madrid)


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Au XVIème siècle, Jacopo Bassano était le spécialiste des peintures religieuses un peu champêtres. Il tient ce style « artiste-paysan » de son père, lui-même peintre reconnu.  Les scènes religieuses que peint Bassano sont très souvent accompagnées de paysages ruraux, d’animaux, de fermes, d’herbes… des éléments auxquels il accorde autant de minutie que le sujet principal de ses tableaux. Ce peintre italien a grandi à la campagne dans un petit village, ce qui lui a permis très tôt d’être au contact quotidien avec des animaux. Il les a donc beaucoup étudié pour parvenir à aussi bien les réaliser.

Spécialiste des scènes religieuses, Bassano adorait peindre l’épisode de l’Arche de Noé, rien d’étonnant pour un passionné d’animaux! Durant sa vie de peindre, il réalisa ce passage de la Genèse à de multiples reprises.

D'après la Bible, Dieu aurait demandé à Noé de construire un immense bateau, une arche, afin de recueillir un couple de toutes les espèces animales pour les sauver du terrible Déluge qui engloutissait la Terre. Noé ainsi que sa femme, ses trois fils et leurs épouses prennent  également place dans l’arche.

Un autre tableau de Bassano, également nommé
"Entrée des animaux dans l’arche de Noé", (vers 1590)
Musée du Louvre (Paris)
Parmi toutes les versions de l’arche de Noé peinte par Bassano, celle-ci peinte vers 1570 et exposée au Musée du Prado est sans doute la plus aboutie.
On peut y voir un vieil homme, Noé, debout au centre de la toile. Comme le ferait un berger, il guide les animaux. Ceux-ci grimpent sur une passerelle et entrent dans l’arche qui va les abriter durant quarante jours et quarante nuits, jusqu’à ce que l’eau redescende.
De nombreuses espèces d’animaux sont représentées. On aperçoit bien sûr les animaux de la campagne (moutons, vaches, chiens, lapins, dindons, chevaux, chèvres), des animaux des forêts (cerfs, lièvres, renards, hiboux). Il y a aussi quelques espèces plus exotiques (lions, singes) qui sont beaucoup moins réalistes, sans doute parce que le peintre n’en a jamais vu de ses yeux.

Tout ce petit monde semble très organisé. La montée dans l’arche se fait dans le calme, ce qui est curieux quand on sait que le Déluge est imminent ! Un chat est même en train de dormir ! Difficile d’imaginer que les chiens résistent à l’envie de courir après les lapins et poules !

Dans cette œuvre, Bassano a surtout souhaité être fidèle au récit de la Bible. Il a bien représenté Noé, sa femme et ses trois fils, Sem , Cam et Japhet avec leurs épouses. Mais il a aussi pris certaines libertés. Par exemple, au lieu d’être des couples, certains animaux comme les moutons ont été peints plus de deux fois. De plus, les lions auraient dû entrer dans l’arche en premier alors qu'ici, ils sont précédés d’un aigle et d’un sanglier.

Ces petites « erreurs » d’interprétation, qui étaient peut être volontaires, n’ont pas empêché l’œuvre de rentrer dans les collections royales espagnoles,  sous le règne de Philippe IV !


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dimanche 3 novembre 2019

n°317
Jaune – Rouge – Bleu (1925)
Vassily Kandinsky



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Œuvre : Jaune – Rouge – Bleu
Artiste :Vassily Kandinsky  
Année : 1925
Technique : Huile sur toile.
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Expressionnisme
Lieu : Musée national d'Art moderne, centre Georges Pompidou (Beaubourg) (Paris)


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Dans les années 1920, Vassily Kandinsky a été l’un des premiers peintres à créer des toiles abstraites.  Il est généralement considéré comme étant l’auteur de la première œuvre non figurative de l’histoire de l’art moderne. Excusez du peu !

Kandinsky avait pourtant démarré son carrière d’artiste peintre par des tableaux figuratifs sur lesquels on admire des portraits ainsi que des paysages déjà très colorés. Mais petit à petit, sa passion pour les couleurs l’a poussé à ne peindre que des œuvres abstraites.
Les traits, les couleurs, les formes suffisent d'après lui à émouvoir et il n'est pas nécessaire qu'une toile représente quoi que ce soit. Ainsi, il  peint en assemblant des combinaisons de formes très géométriques et de couleurs. "Les couleurs sont ce dont on se souvient le mieux" écrivait le peintre.

Cette nouvelle manière de peindre a créé une véritable tempête dans le monde de l’art. Un tel scandale que le peintre fut considéré comme un « fou incurable » par la critique !
Ce n’est qu’après la Première Guerre Mondiale que ses toiles deviendront autant géométriques.
En 1925, il peint ce tableau, qu’il nomme simplement Jaune-Rouge-Bleu et qui deviendra son œuvre la plus connue.

Pour la première fois, Kandinsky associe de nombreux éléments très différents : des formes géométriques, des formes libres, des formes en mouvement, deséléments immobiles... Les couleurs dégradés se mêlent avec des aplats (des couleurs uniformes). Sans qu’on sache si ce fut volontaire ou non, plusieurs formes nous autorisent à imaginer un visage ou un damier. Tout cela semble bien complexe ! Le peintre semble ne respecter aucune règle et avoir une liberté totale dans cette toile mais la construction du tableau a été pourtant très réfléchie :

Tous les éléments du tableau (les lignes noires, les damiers, les cercles…) s’articulent avec trois formes principales : un rectangle vertical jaune, une croix rouge légèrement inclinée et un grand cercle bleu foncé (d’où le titre de l’œuvre).

En fait, par ce tableau, Kandinsky a souhaité illustrer et mettre en pratique la fameuse « théorie des couleurs »  de Johann Wolfgang Von Goethe. En 1810, Goethe fut le premier à s’intéresser scientifiquement à  la couleur. Il observe par exemple comment les yeux perçoivent les couleurs.
Pour lui, la couleur est un mélange de lumière et d'ombre. Le jaune serait « tout proche de la lumière » alors que le bleu serait « tout proche de l’ombre ». Si on intensifie du jaune ou du bleu, on obtiendrait la troisième couleur primaire ; le rouge.

Pour Kandinsky, si les couleurs ne sont que lumières et ombres, elles ont une incidence sur la manière dont on les perçoit. Pour le peintre, les couleurs et les formes détermineraient des impressions particulières, des sensations ou des sentiments différents : le bleu est sombre donc froid et mystérieux. Il s’oppose au jaune qui est chaud et agressif. Le vert est plutôt paisible tandis que le rouge est très passionné etc…

Kandinsky était très spirituel et pensait que la peinture agissait  directement sur les sens et sur l’émotion. L’œuvre est donc composée de deux parties qui s’opposent pour former un équilibre : 
-  les trois couleurs primaires sont présentes :  le jaune (chaud et lumineux) à gauche s’oppose avec le bleu (sombre et froid) à droite. Un peu comme si il y avait le jour (le Soleil) et la nuit (La Lune)
-  les lignes géométriques fines immobiles à gauche s’opposent aux formes libres épaisses et en mouvement à droite

Que l’on aime l’œuvre ou non, qu’on la comprenne ou non, Kandinsky réussit toujours à nous embarquer dans son univers. Le peintre disait d’ailleurs « Créer une œuvre c’est créer un monde. ». C’est réussi ! 

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vendredi 1 novembre 2019

n°316
Albert Einstein tirant la langue (1951)
Arthur Sasse



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Œuvre : Albert Einstein tirant la langue
Artiste : Arthur Sasse  
Année : 1951
Technique : Photographie en noir et blanc
Epoque : Contemporaine
Mouvement : Aucun
Lieu : Exemplaire original l'agence de presse américaine UPI 

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Voici l’histoire d’une banale photographie de presse devenu l’une des photographies les plus célèbres au monde. Elle représente le plus célèbre et surtout l'un des plus grands scientifiques de l'histoire: Albert Einstein.

Le physicien allemand Albert Einstein a révolutionné le monde des sciences physiques. Ce véritable génie scientifique à l’intelligence hors-norme est lauréat du prestigieux Prix Nobel de Physique en 1921 pour ses recherches. Il a notamment publié, en 1915, une théorie scientifique révolutionnaire, la théorie de la relativité générale, qui a des applications dans de nombreux domaines, comme l’étude des étoiles ou l’énergie nucléaire... On connait tous également cette équation scientifique (sans forcément la comprendre) : e=mc².


Un scientifique sérieux, qui s’amuse pourtant à tirer la langue au photographe comme le ferait un petit garçon. Une langue tirée qui contraste avec l’idée qu’on se fait d’un scientifique de son ampleur, une image sérieuse et même un peu ennuyeuse parfois. Cette fameuse langue tirée rendit le cliché célèbre dans le monde entier. Mais pourquoi tire-t-il la langue ?

Nous sommes le 14 mars 1951. Einstein fête ses 72 ans au Princeton, un club privé de New York. Lorsqu’il quitte la soirée, il prend place dans sa voiture entouré de ses amis, le professeur Frank Aydelotte, ancien directeur de l'Institute for Advanced Study, et sa femme, dans une voiture.
Le scientifique qui a déjà été suivi toute la journée par une horde de journalistes et de photographes est fatigué et lassé d’être pris en photo.
Un des journalistes présents, Arthur Sasse, photographe de l'agence de presse américaine UPI (United Press International), insiste et lui demande "Monsieur Einstein, s'il vous plait : un dernier sourire pour votre anniversaire !".



Pressé d’en finir, à défaut d’un sourire, le scientifique tira la langue au photographe, un geste spontané qu’Arthur Sasse a eu le temps de photographier. Einstein y montre une langue très pointue et des yeux écarquillés.


Dans la foulée, l’agence de presse met à disposition la photographie. C’est ainsi que quelques jours plus tard, le cliché recadré et centré sur le visage d’Einstein tirant la langue fit la une des journaux du monde entier.

Einstein lui-même s’amusa du succès de la photographie.  "Cette pose révèle bien mon comportement. J'ai toujours eu de la difficulté à accepter l'autorité et, ici, tirer la langue à un photographe qui s'attend sûrement à une pose plus solennelle, cela signifie que l'on refuse de se prêter au jeu de la représentation, que l'on se refuse à livrer une image de soi conforme aux règles du genre." expliqua le scientifique.

Aujourd’hui cette photo d’un illustre scientifique dans cette attitude rebelle et provocatrice est devenue le symbole de la pop culture. La photo fut maintes et maintes fois reproduite et détournée, parfois avec beaucoup d’humour.


Après l'avoir vu dans le journal, Einstein a envoyé une lettre à l'agence de presse pour demander neuf copies à donner à ses amis, et a demandé que l'image soit recadrée pour ne montrer que son visage. En 2009, l'un de ces tirages de la photographie, signé de la main d'Einstein, a atteint le prix record de 74 324 dollars lors d'une vente aux enchères.
Sous la photo, Einstein avait écrit un dernière commentaire peu avant sa mort en 1955: "Ce geste s'adresse à toute l'humanité. Il montre qu’un simple civil peut se permettre de faire ce qu'aucun diplomate n'oserait." Rebelle jusqu’au bout !



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