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Bien que son œuvre soit assez méconnue, l’artiste belge Léon Spilliaert reste l’un des plus grands représentants du symbolisme, ce mouvement artistique du début du XXème siècle qui se veut à l’opposé de l’impressionnisme. Les peintres symbolistes explorent avec passion les univers étranges, les légendes médiévales, le rêve et la nostalgie. L’étrange et l'irréel sont au cœur de leurs œuvres. Ce dessin en est d’ailleurs un bon exemple.
Léon Spilliaert est issu d’une famille d’artistes mais il s’est pourtant formé seul après seulement quelques mois d’études à l’Académie de Bruges. Il dessine ensuite beaucoup sur papier délaissant dans un premier temps la peinture.
A partir de 1902, il va réaliser de très nombreux autoportraits, souvent en trois-quarts comme celui-ci.
Dans cet Autoportrait dit « aux masques », Spilliaert est représenté de trois quarts masquant une partie de son visage. Il porte une veste très élégante qui le rend un peu austère. Le regard de l’artiste est très intense, très profond presque théâtral. Une grande intériorité s’y dégage, ses yeux sont perdus dans l’ombre. Comme nombre de ses œuvres, le jeu du noir et du blanc est très maîtrisé, à la manière d’un clair-obscur. Tout cela crée une atmosphère sombre, étrange voire macabre et cauchemardesque.
Autour de lui apparaissent d’autres portraits : deux à sa droite dans l’ombre et un portrait à gauche qui est inachevé. Ceux de droite semblent être des reflets de son visage dans un miroir, objet qui fascinait l’artiste et qui est récurrent dans ses œuvres. Mais en y regardant de plus près, on s’aperçoit que dans ses reflets, l’artiste s’est représenté plus âgé en haut et très âgé en bas. A gauche, dans le portrait inachevé, c’est l’inverse, il apparaît plus jeune. Spilliaert a voulu faire de cet autoportrait multiple la représentation de lui-même à tous les âges de la vie.
Comme le montre le portrait au crayon à gauche, l’œuvre reste inachevée. Toute la partie gauche du dessin a d’ailleurs été gommée, on y aperçoit encore quelques traces de crayons oubliées. L’artiste était semble-t-il insatisfait de son dessin et a fini par abandonner cette partie, la préférant vide et blanche car elle met davantage le portrait central en valeur. Cette hésitation explique d’ailleurs la présence de deux signatures sur l’œuvre.
Comme le montrent les nombreux autoportraits qu’il réalisa à cette époque, Spilliaert était fascinée par sa propre image. Cette fascination n’est ni égocentrisme, ni mégalomanie mais elle témoigne au contraire du profond mal-être que l’artiste éprouvait pour lui-même.
Dans certaines œuvres, il se représente même en monstre aux yeux exorbités, ou avec le visage déformé rappelant certaines œuvres de Munch. Spilliaert était solitaire, torturé, angoissé et sans cesse inquiet. Ce n’est qu’après la Première Guerre Mondiale qu’il laissera de côté les couleurs sombres au profit d’une palette plus claire et plus colorée.
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